L'article #09 : H.P. Lovecraft

€4.00

Howard Phillips Lovecraft : Horreur en grande profondeur

L'article d'Arnaud de la Croix

Editorial : Maxime Lamiroy

Illustrations : Hugues Hausman

ISBN : 978-2-87595-485-5

Parution le 1 juin 2021

Prix : 4€ 

éditorial

Ces derniers temps, à la lecture des manuscrits de jeunes écrivains, à la rencontre de ceux-ci, trois mots me viennent à l’esprit : « et ses démons ». Le titre d’un des derniers romans de l’écrivain russe Limonov – disparu l’an dernier, un 17 mars – ne cesse de me revenir en tête. Je ressens chez Limonov et les jeunes artistes, une lutte intérieure très dynamique avec des figures angoissantes, des fantômes rampant sur le tréfonds de l’enfance. Et tout individu ne remporte la maturité qu’après avoir accepté le face-à-face avec ses démons juvéniles (peur de la mort, du jugement des autres, etc.). La plupart des écrivains reportent ce duel, et souvent de manière inconsciente.
Leur instinct leur dicte qu’après cet affrontement, ils auront perdu la source de leur créativité et de leur art. Car la question de la littérature, de sa nécessité, se pose directement à tout être vivant qui s’est libéré, qui est devenu vainqueur des frayeurs existentielles : « y a-t-il encore un sens à écrire ? »
Lovecraft fait partie de ces écrivains qui ont très tôt affronté leurs démons intérieurs au cours d’une nuit fatidique. Et cette victoire sur lui-même lui a permis de pénétrer sans crainte au royaume des horreurs intimes de l’humanité. Déployant un fil d’Ariane presque cassant – à force de remonter le fil des temps immémoriaux et mouvants –, Arnaud de la Croix nous guide dans le labyrinthe repoussant et plongé dans l’obscurité de nos craintes communes. Le projet de Lovecraft fut de rejouer à un niveau plus large le duel que les jeunes écrivains évitent avec eux-mêmes. Il faut être libre de soi-même pour voir que la littérature est un lieu de naufrage pour la raison. Le lecteur sait par exemple que dans les textes bibliques, l’histoire montrera que les imbéciles sont ceux qui n’auront pas cru en Dieu et aux miracles ; il sait aussi que dans les textes fantastiques, le récit fera courir à leur perte les esprits rétrogrades qui auront nié l’existence d’autres mondes et d’autres formes d’existence. Or dans la vie quotidienne, le lecteur ne croit ni aux miracles, ni aux autres mondes. L’existence de cette double appréhension de la réalité est à l’image de ce mythe ancien de la nature double des démons, issus de femmes et d’anges. Jamais pourtant Lovecraft n’a conduit l’humanité dans ses récits au face-à-face qui l’avait très tôt libéré de ses démons intimes, un tel affrontement – par nature apocalyptique – aurait signé la fin de toute littérature fantastique…

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